Le fait qu’une procédure de divorce ou de séparation de corps présente un élément d’extranéité (nationalité étrangère d’un époux ou domicile conjugal fixé à l’étranger) ne permet pas d’exclure la compétence des juridictions françaises.
Depuis l’entrée en vigueur du règlement n°1347/2000 du 29 mai 2000 abrogé par le règlement 2201/2003 du 27 novembre 2003, les règles de compétence internationale des états membres de la communauté ont été unifiées en matière de divorce et de séparation de corps.
§ 1 – Le domaine d’application du règlement 2201/2003 du 27 novembre 2003
Le règlement du 27 novembre 2003 traite de la compétence, de la reconnaissance et de l’exécution des décisions en matière matrimoniale. Il s’applique aux procédures de divorce et de séparation de corps, non aux effets patrimoniaux du mariage, aux pensions alimentaires et aux mesures accessoires.
§ 2 – Les règles de compétence posées par le règlement n° 2201/2003 du 27 novembre 2003
Le règlement du 27 novembre 2003 liste les chefs de compétences internationales directes déterminant la compétence des tribunaux des Etats membres.
L’article 2 du règlement prévoit :
« Compétence générale
1. Sont compétentes pour statuer sur les questions relatives au divorce, à la séparation de corps et à l’annulation du mariage des époux, les juridictions de l’État membre:
a) sur le territoire duquel se trouve:
– la résidence habituelle des époux, ou
– la dernière résidence habituelle des époux dans la mesure où l’un d’eux y réside encore, ou
– la résidence habituelle du défendeur, ou
– en cas de demande conjointe, la résidence habituelle de l’un ou l’autre époux, ou
– la résidence habituelle du demandeur s’il y a résidé depuis au moins une année immédiatement avant l’introduction de la demande, ou
– la résidence habituelle du demandeur s’il y a résidé depuis au moins six mois immédiatement avant l’introduction de la demande et s’il est soit ressortissant de l’État membre en question, soit, dans le cas du Royaume-Uni et de l’Irlande, s’il y a son « domicile »;
b) de la nationalité des deux époux ou, dans le cas du Royaume-Uni et de l’Irlande, du « domicile » commun.*
2. Aux fins du présent règlement, le terme « domicile » s’entend au sens des systèmes juridiques du Royaume-Uni et de l’Irlande.
Ces chefs de compétence sont des options offertes au demandeur, sans hiérarchie entre elles.
Concrètement, en application de cet article, les juridictions françaises pourront être saisies :
– si les deux époux ont la nationalité française ;
– s’ils résident tous deux habituellement en France ;
– si leur dernière résidence commune est en France et si l’un des deux y vit encore ;
– si l’époux défendeur réside habituellement en France ;
– Si, en présence d’une résidence habituelle en France d’un des deux époux, le tribunal français est saisi d’une procédure de divorce par consentement mutuel ;
– si le demandeur réside habituellement en France depuis un an, et ce même s’il est de nationalité étrangère;
– si le demandeur est de nationalité française et réside habituellement en France depuis au moins six mois.
L’article 4 intitulé « Demande reconventionnelle » précise, par ailleurs, que « la juridiction devant laquelle la procédure est pendante en vertu de l’article 3 est également compétente pour examiner la demande reconventionnelle, dans la mesure où celle-ci entre dans le champ d’application du présent règlement. »
En outre, l’article 5 du règlement indique que « la juridiction de l’État membre qui a rendu une décision sur la séparation de corps est également compétente pour convertir cette décision en divorce, si la loi de cet État membre le prévoit. »
§ 3 – Caractère impératif des règles de compétence posé à l’article 6 du règlement
L’article 6 du règlement évoque le caractère exclusif des règles de compétence posées aux articles 3, 4 et 5 susvisés. Cet article prévoit :
« Un époux qui:
a) a sa résidence habituelle sur le territoire d’un État membre, ou
b) est ressortissant d’un État membre ou, dans le cas du Royaume-Uni et de l’Irlande, a son « domicile » sur le territoire de l’un de ces États membres,
ne peut être attrait devant les juridictions d’un autre État membre qu’en vertu des articles 3, 4 et 5.
En d’autres termes, l’époux qui, soit réside habituellement dans un état membre, soit à la nationalité d’un état membre, ne peut être attrait devant le juge d’un autre état membre qu’en vertu des chefs de compétence mentionnés à l’article 2.
Par ailleurs, lorsque aucune juridiction d’un État membre n’est compétente en vertu des articles 3, 4 et 5, l’article 7 du règlement prévoit que « la compétence est, dans chaque État membre, réglée par la loi de cet État. » Cet article ajoute que « Tout ressortissant d’un État membre qui a sa résidence habituelle sur le territoire d’un autre État membre peut, comme les nationaux de cet État, y invoquer les règles de compétence applicables dans cet État contre un défendeur qui n’a pas sa résidence habituelle dans un État membre et qui ou bien n’a pas la nationalité d’un État membre ou, dans le cas du Royaume-Uni et de l’Irlande, n’a pas son « domicile » sur le territoire de l’un de ces États membres. »
Dominique Ponté
Avocat au Barreau de Paris