L’article 32 de la loi de 1948 prévoit que :
« Chaque propriétaire devra, avant le 1er janvier 1949, faire connaître à chaque locataire ou occupant, par lettre recommandée, avec accusé de réception, ou par acte extrajudiciaire, le loyer des locaux qu’il occupe. Le propriétaire doit joindre, à l’appui de cette notification, un décompte détaillé, établi d’après un modèle type qui sera annexé au décret prévu à l’article 28, des bases de calcul de ce loyer. (…) »
Or, en l’absence d’un décompte initial, il n’est pas possible de modifier les bases du loyer sans expertise judiciaire.
Dans un arrêt du 14 novembre 1996 (N° de pourvoi : 94-20019), la Cour de Cassation a ainsi indiqué :
« Attendu que Mme B… fait grief à l’arrêt de décider qu’elle se trouve forclose dans son action en contestation des loyers notifiés par ses locataires et qu’il n’y a pas lieu à une nouvelle expertise, alors, selon le moyen, « que l’article 32 bis de la loi du 1er septembre 1948, qui prévoit la possibilité d’une révision de loyer en cas de modification des éléments ayant servi de base à sa détermination, suppose l’existence préalable d’un loyer déterminé suivant les formes légales exigées par l’article 32 et qu’en l’occurrence, la cour d’appel ayant elle-même constaté qu’aucun décompte de surface corrigée n’avait été établi à l’origine du bail et que le loyer n’avait pas encore été fixé conformément à la loi du 1er septembre 1948 n’a pu opposer à la propriétaire la forclusion édictée par l’article 32 bis, sans violer, par fausse application, le texte précité »;
Mais attendu que la cour d’appel ayant relevé que l’avis sur la valeur du loyer donné par un expert judiciaire présentait toutes garanties de sérieux et que le prix du bail serait donc fixé à ce montant, le moyen est sans portée ; »
Ainsi, dans ce cas d’espèce, le nouveau décompte a été retenu uniquement parce qu’établi par un expert judiciaire.
Dans un arrêt du 28 mars 1995, la Cour de Cassation a, en outre, précisé que le locataire restait recevable à contester un loyer ou à solliciter la détermination de la catégorie du local lorsque décompte n’avait été établi et ce nonobstant le fait qu’il ait, pendant des années, accepté un loyer non justifié par un décompte. Dans cet arrêt, elle a indiqué :
« Attendu qu’ayant relevé que la bailleresse ne justifiait pas de la notification d’un décompte de surface corrigée comportant le classement des locaux, que la dénonciation du contrat initial était intervenue unilatéralement et n’avait été suivie d’aucun autre contrat ou d’aucun congé, la cour d’appel a légalement justifié sa décision en retenant que, nonobstant l’acceptation d’un loyer non justifié par un décompte de surface corrigée, la locataire restait recevable à solliciter la détermination de la catégorie des locaux conformément aux dispositions du décret du 10 décembre 1948 ».
Enfin, la Cour de Cassation précise que la révision du loyer, qui peut être demandée dans le cadre de l’article 32 bis de la loi de 1948, suppose que le loyer initial ait été déterminée dans les formes requises à l’article 32.
L’article 32 bis dispose ainsi :
« En cas de modification totale ou partielle des éléments ayant servi de base à la détermination du loyer, ce loyer pourra être revisé à la demande de l’une ou de l’autre des parties.
(Décr. no 60-1057 du 1er oct. 1960) «Le demandeur doit faire connaître à l’autre partie par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par acte extrajudiciaire les nouveaux éléments proposés. Il doit joindre à l’envoi de cette notification un décompte détaillé, établi d’après un modèle type annexé au décret prévu à l’article 28, des bases de calcul de ce loyer (…) »
Or, dans un arrêt du 26 février 1972, la Cour de Cassation a précisé que la révision du loyer fondée sur l’article 32 bis de la loi du 1er septembre 1948 supposait l’existence préalable d’une redevance locative déterminée suivant les formes de l’article 32. (Cassation civile 3e, 16 février 1972 : Dalloz 1972. 366).
Elle a précisé que, lorsque le prix du loyer n’avait été déterminé conformément à l’article 32 de la loi de 1948, l’article 32 bis était inapplicable de sorte que le locataire pouvait, en l’absence de notification d’un décompte initial par le propriétaire, saisir le juge pour faire fixer la valeur locative. (Cassation Civile 3e, 24 mars 1971 : Bull. civ. III, no 207. Cassation civile 3e, 20 novembre 1991 : Bull. civ. III, no 282.).
Dans l’arrêt du 20 novembre 1991, la Cour de Cassation a indiqué :
« Vu les articles 32 et 32 bis de la loi du 1er septembre 1948 ;
Attendu que pour fixer le loyer légal au 1er juillet 1983 et condamner M. Z… à payer à Mlle Y… un trop-perçu de loyers à compter du 13 mars 1981, l’arrêt retient qu’après la notification, par la locataire au bailleur, d’un décompte détaillé, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 24 juin 1983, en application de l’article 32 bis, alinéa 2, de la loi du 1er septembre 1948, M. Z… devait, conformément à l’alinéa 3 du même article, contester le décompte dans le délai de 2 mois à peine de forclusion, ce qu’il n’a pas fait ;
Qu’en statuant ainsi, alors que les dispositions de l’article 32 bis prévoyant les modalités de révision du loyer légal en cas de modification des éléments ayant servi à le déterminer, ne sont pas applicables lorsque ce loyer n’a pas encore été fixé conformément à la loi du 1er septembre 1948, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; »