Selon l’article 1717 du Code civil, » le preneur a le droit de sous-louer et même de céder son bail si la faculté ne lui a pas été interdite. » Ainsi, en vertu de cet article, la faculté de céder et de sous-louer est un principe. L’article 78 de la loi du 1er septembre 1948 renverse ce principe en disposant l’interdiction de céder ou de sous-louer. Cet article dispose :
« À dater de la publication de la présente loi, par dérogation à l’article 1717 du code civil, le preneur n’a le droit ni de sous-louer, ni de céder son bail, sauf clause contraire du bail ou accord du bailleur.
Toutefois, par dérogation à l’alinéa précédent et nonobstant toutes clauses contraires, le locataire principal ou l’occupant maintenu dans les lieux a toujours la faculté de sous-louer une pièce lorsque le local comporte plus d’une pièce.
Dans les communes visées à l’article 10 7° ci-dessus, le locataire principal ou l’occupant maintenu dans les lieux, vivant seul et âgé de plus de soixante-cinq ans, peut sous-louer deux pièces à la même personne ou à deux personnes différentes, sous réserve que le local ne comporte pas plus de cinq pièces.
Dans le délai d’un mois, le locataire ou occupant est tenu, à moins que la sous-location n’ait été expressément autorisée par le propriétaire ou son représentant, de notifier cette sous-location au bailleur par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, en précisant le prix demandé au sous-locataire, sous peine de déchéance du droit au maintien dans les lieux. »
L’interdiction édictée par ce texte n’atteint toutefois que la cession et la sous-location laquelle se caractérise par l’existence d’une contrepartie. En revanche, s’agissant du prêt du logement ou de l’hébergement gratuit, leur validité dépend des clauses du bail.
En principe, l’absence de contrepartie s’oppose à ce qu’un hébergement soit requalifié en une sous-location interdite. Néanmoins, la sous-location irrégulière a été reconnue en présence d’un usage gratuit et prolongé de locaux par d’autres personnes que le locataire principal. (Cassation sociale 8 juillet 1955 bull. civ. IV n° 618).
Par ailleurs, lorsque le bail prévoit que le locataire doit employer les lieux loués uniquement en vue d’y faire son habitation personnelle ainsi que celle de sa famille, à l’exclusion de l’exercice de toute profession, et qu’il mentionne également qu’il ne pourra, ni le sous louer, ni céder son droit, ni prêter les lieux à des tiers, et ce sous quelque prétexte que ce soit, la tendance de la jurisprudence est de sanctionner toute forme d’hébergement et de condamner l’exercice d’une activité professionnelle exercée dans les lieux.
Dans un arrêt du 20 janvier 1988 (N° de pourvoi : 86-16279), la Cour de Cassation a approuvé une décision rendue par la cour d’appel ayant prononcé la résiliation du bail aux torts du locataire au motif que celui-ci avait contrevenu à la clause du bail qui interdisait l’exercice d’une activité professionnelle en domiciliant leur activité professionnelle dans les lieux. À cet égard, la Cour de cassation a précisé :
« Attendu que les époux C… font encore grief à l’arrêt d’avoir, pour résilier le bail à leurs torts, retenu qu’ils avaient contrevenu à la clause du bail interdisant l’exercice d’une activité professionnelle dans les lieux loués, alors, selon le moyen, “que la simple domiciliation figurant au récépissé du Répertoire des Métiers ou aux extraits d’inscription à ce répertoire n’établissait pas l’exercice effectif d’une activité professionnelle dans les locaux ; que l’expert ayant constaté dans son rapport qu’aucune activité professionnelle n’avait été exercée, la cour d’appel, qui ne constate pas l’exercice effectif d’une activité professionnelle dans les locaux, a violé par fausse application l’article 1184 du Code civil, par sa décision déclarant résiliée la convention aux torts des preneurs” ;
Mais attendu qu’en constatant la domiciliation de l’activité professionnelle des preneurs dans les lieux loués, la cour d’appel a légalement justifié sa décision de ce chef ; »:
Dans un précédent arrêt du 23 janvier 1970 (n° de pourvoi 68-20126), la Cour de Cassation avait déjà indiqué que l’exercice d’une activité professionnelle et l’hébergement d’une association dans les lieux loués constituaient des manquements graves commis par le locataire à ses obligations, justifiant la résiliation du bail. Les termes de cet arrêt ont été les suivants :
« Que les époux X… font grief à l’arrêt d’avoir décidé que l’hébergement, dans les lieux loués, de l’association dite syndicat national des automobilistes, constituait un manquement grave “aux clauses du bail et à l’intention des parties lors de la conclusion de cette convention”, alors, selon le pourvoi, que, d’une part, un hébergement ne constitue ni une sous-location, ni une cession de bail et ne peut, “en raison de son caractère étymologiquement précaire”, constituer un manquement grave à la clause 8 du bail et à l’intention des parties lors de sa conclusion et que, d’autre part, dans des conclusions restées sans réponse, les demandeurs au pourvoi faisaient valoir que X… avait cessé son activité de président de la section locale du syndicat des automobilistes;
Mais attendu que les juges d’appel, après avoir rappelé que les lieux devaient être occupés “personnellement et bourgeoisement”, énoncent qu’il est “établi qu’au premier étage du pavillon réservé à l’habitation se trouvait le siège du comité départemental du syndicat national des automobilistes”, que, dans un bureau, il y avait une “secrétaire qui travaillait dans les lieux lors du constat ;
Qu’ils relèvent encore “qu’il est atteste que des réunions des membres du syndicat eurent lieu à cet endroit de juin 1964 au printemps 1965, à l’issue desquelles, entre 23 et 24 heures, le silence de la rue fut trouble par des interpellations bruyantes, le claquement des portières des automobiles et les coups d’accélérateur”;
Attendu que, de ces constatations, la cour d’appel, qui devait apprécier la gravité des manquements du preneur à ses obligations, au temps de leur commission, répondant, implicitement mais nécessairement, aux conclusions prétendument délaissées, a justement déduit que les époux X… avaient commis un manquement aux clauses du bail, faute dont elle a souverainement apprécié la gravite, et qu’ils ne pouvaient être considérés comme des occupants de bonne foi ayant droit au maintien dans les lieux; »
Dans un arrêt du 25 janvier 1961, la Cour de Cassation avait également retenu un manquement du preneur à ses obligations dans le cadre d’un hébergement gratuit et prolongé. Dans cet arrêt, elle avait jugé que c’est à bon droit qu’une cour d’appel avait déclaré déchu du droit au maintien dans les lieux, pour infraction à la clause du bail interdisant la sous-location, une association qui, locataire de l’appartement litigieux, y a laissé s’installer gratuitement, sans l’autorisation préalable du bailleur, trois autres associations au sein desquelles se trouvaient ses propres membres. Elle a noté qu’interprétant souverainement la clause contractuelle invoquée, les juges du second degré avaient estimé à juste titre qu’elle comportait nécessairement pour le preneur interdiction de concéder pour une longue durée à des tiers la jouissance de tout ou partie des lieux sans l’accord du propriétaire de sorte qu’il convenait de dire que,
« Bien qu’il ne soit pas établi qu’un versement de loyer ait été effectué par les associations, leur hébergement prolongé qui durait depuis des années malgré une sommation d’avoir à faire cesser cette situation, constituait une infraction à la clause du bail. »
Notons que, dans un arrêt du 25 février 2016, elle a indiqué que « la domiciliation d’une personne morale dans les locaux à usage d’habitation pris à bail par son représentant légal n’entraînait pas un changement de la destination des lieux si aucune activité n’y était exercée ». À cet égard, elle a précisé :
« Qu’ayant relevé que la société « Les nouvelles impressions » avait fixé son siège à l’adresse des lieux loués du 19 avril 2011 au 11 décembre 2012 mais que M. X… n’y accueillait ni secrétariat, ni clientèle, qu’il n’y avait aucune machine ni activité commerciale et qu’aucun trouble lié à une telle activité n’avait été constaté par les voisins, la cour d’appel a pu en déduire que la preuve d’une violation de la clause d’habitation bourgeoise n’était pas rapportée ;